J'ai 50 ans et j'aime bien vieillir
Photo by Marivi Pazos on Unsplash
Alors que les jeunes filles traquent leurs futures rides, des femmes plus âgées ont su se libérer des diktats et faire du temps leur allié. Quatre d'entre elles nous racontent le vrai bonheur d'une cinquantaine décomplexée.
Pour les jeunes de notre table ronde (J'ai 25 ans et j'ai peur de vieillir) Josée, Christiane et les deux Danièle sont des "vieilles". Des femmes de quarante à soixante ans, aux parcours de vie plutôt bousculés. Danièle a osé rompre avec son mari et recommencer sa vie professionnelle à quarante ans passés. Après un cancer, Josée a décidé de se consacrer à sa passion, le dessin. "Je suis reconnaissante au temps qui passe de m'avoir appris à fuir l'urgence", dit l'autre Danièle. Toutes ont su tourner le dos à la lutte contre le vieillissement physique, au laisser-aller ou à la résignation.
"Elles acceptent la métamorphose et sont en accord avec les réalités de leur évolution, observent deux anthropologues que nous avons rencontrées. Du coup, qu'elles aient des enfants ou non, elles ont trouvé leur place et leur rôle dans la chaîne des générations." Des femmes apaisées qui ont su se dégager des pressions et des tabous. Plutôt que de se battre contre le temps, elles s'en sont fait un allié.
DANIÈLE, 54 ANS, CÉLIBATAIRE SANS ENFANT
"Je ne me suis jamais mariée, je n'ai pas voulu d'enfant, je n'ai pas fait de carrière. J'ai toujours choisi de vivre hors norme. L'avantage, en vieillissant, c'est qu'on ne me demande plus de me justifier. À cinquante-quatre ans, je me sens plus libre que jamais. Complètement libre. Après avoir vécu à l'étranger, comme photographe de théâtre ou productrice de radio, depuis six ans je me suis installée en région. Je vis dans une petite maison, en pleine nature, avec les oiseaux, les fleurs, les arbres, mon iMac et Internet. Et je traduis des livres. J'ai trouvé ma place, ma vraie place. Être une interprète ou une agence de conseil, celle qui cherche à comprendre les choses et les gens. "Je suis reconnaissante au temps qui passe de m'avoir appris à fuir l'urgence et à ne plus chercher à tout contrôler. À accepter tout simplement ce que la vie me donne. Après cinq ans de solitude, Patrick, un homme de quarante ans, est arrivé dans ma vie. Un homme avec une tête de lutin, avec qui je joue comme une enfant, dans une agréable légèreté, sans plan d'avenir ni angoisse."
"Je me suis fait aussi une tribu de bons amis à travers ma passion pour les livres et les Indiens, et autour de la lutte contre l'illettrisme. Des gens qui partagent les mêmes valeurs, qui sont dans le même bateau. Et avec les enfants de mes copines, des ados et des grands ados entre quinze et vingt-six ans, j'ai repris le rôle traditionnel des anciens; je suis la sagesse, celle qui sait écouter et servir d'intermédiaire. Plus jeune, j'ai traversé des périodes difficiles, avec déprime, crise d'angoisse et de tétanie. Ma vision pessimiste du monde me rendait malheureuse. Avec le temps, même si j'ai gardé la même colère, la même révolte, j'ai appris à passer entre les roches, à ne plus porter tout le poids du monde. La vie m'a appris à lâcher et à perdre, et je sais que je saurai mourir en paix. C'est le plus important. Cette fois, je suis moi, je suis mon histoire. Tout est cohérent."
JOSÉE, 44 ANS, DEUX ENFANTS
"Je n'ai jamais été obsédée ni préoccupée par mon âge. J'y pense au moment de mes anniversaires, pas plus. Vers trente-cinq, quarante ans, alors que la plupart de mes copines commençaient à lutter contre leurs premières rides, j'assumais tranquillement les miennes. Avec un peu de khôl et un brin de rouge à lèvres, j'ai toujours été en paix avec mon apparence physique.
"C'est un peu plus tard que j'ai réalisé que dans le fait de vieillir, il y avait un enrichissement et une force. À quarante et un ans, j'ai eu un cancer des ganglions. On m'a soignée pendant toute une année. Et je suis passée par une dégradation physique beaucoup plus rapide et violente que le vieillissement. J'ai souffert, maigri, subi une opération qui aurait pu paralyser une partie de mon visage, et j'ai perdu mes cheveux. Tout s'en allait: le féminin, la jeunesse et la vitalité. A toute allure.
"C'est à ce moment-là que j'ai fait le bilan de ma vie. Je me suis aperçu que, dans ma jeunesse, j'avais tout construit très vite. À dix-sept ans, j'ai arrêté mes études et j'ai commençé à travailler pour être autonome et vivre avec Yann. À vingt-cinq ans, nous étions mariés, avec deux enfants, et j'étais dans l'enseignement bureautique.
"J'avais donné la priorité à l'amour, à mon couple, à ma famille, sans vraiment prendre le temps de faire mes propres choix professionnels. J'avais des frustrations, des désirs enfouis autour d'une passion inassouvie pour le dessin. Alors, une fois guérie, avec le soutien de ma famille et d'un analyste, j'ai quitté la compagnie pour laquelle je travaillais depuis onze ans pour me former et créer mon atelier de décoration sur céramique et verre. "Plus jeune, j'en aurais été incapable. J'étais bien trop timide, trop peu sûre de moi pour porter cette responsabilité et en assumer les risques financiers. Mais je ne suis plus celle qui écoute et qui ne sait pas dire non. L'âge, le temps et mes diverses expériences professionnelles m'ont donné une maturité et une certaine assurance.
"Aujourd'hui comme hier, Yann et mes grands enfants sont toujours mes valeurs sûres, mes appuis, et moi je me sens mieux. Mais je me suis découvert une aisance, une audace et une créativité que j'aime bien. Je suis à la fois plus exigeante, mais aussi plus calme, plus sereine. Et je me donne deux ans pour me faire connaître et vivre de cette nouvelle activité.
CHRISTIANE 60 ANS MARIÉE, QUATRE ENFANTS, UN PETIT-FILS
"Je suis née dans le cirque et, à dix- neuf ans, j'ai épousé Emilien. J'ai arrêté mon numéro de chevaux sur piste à trente-cinq ans. Cela peut paraître trop tôt, mais j'ai des beaux souvenirs et aucun regret. Parce qu'il n'y a eu ni rupture ni séparation. Ma vie dans le cirque a continué, de manière différente mais avec les mêmes gens, les mêmes soucis et le même style de vie.
"Aujourd'hui encore, j'habite au coeur du cirque d'hiver, je m'occupe de ma famille, parfois j'aide à la fabrication des costumes de scène et j'organise toujours des spectacles pour des comités d'entreprise. En octobre, quand nous présenterons "Piste", notre prochain spectacle, je serai là et j'aurai l'oeil partout. À dix, quarante ou quatre-vingt dix ans, le cirque a toujours été et sera toujours ma maison. Chez nous, dans les grandes familles du cirque traditionnel, on n'est ni jeune ni vieux, on est avant tout avec et pour le cirque.
"Dans ma tête, je n'ai pas d'âge. Et je ne lutte ni contre mes rides ni contre mes kilos en trop. Je me fatigue sans doute plus qu'avant... Mais il faudrait vraiment que j'aie à peindre le plafond ou à changer le tapis pour que je m'en rende compte!
J'ai passé ma vie à côté d'acrobates et de trapézistes qui travaillent avec leur corps, leur énergie, leur vitalité, leur précision.Je sais qu'un accident est toujours possible, que la vie n'existe pas sans risque et qu'arrive un jour, quand le corps ne peut plus suivre, où il faut bien s'arrêter.
"Peut-être que dans notre monde à nous, on accepte plus facilement de vieillir. J'ai passé ma vie à côté d'acrobates et de trapézistes qui travaillent avec leur corps, leur énergie, leur vitalité, leur précision. Je sais qu'après six mois sans entraînement, la reprise du travail physique se fait très doucement, graduellement. Je sais qu'un accident est toujours possible, que la vie n'existe pas sans risque et qu'arrive un jour, quand le corps ne peut plus suivre, où il faut bien s'arrêter. Je connais la valeur du temps, les lois et les rythmes du corps. Et je les respecte.
"Je vais vieillir et finir ma vie dans le cirque. Comme ma mère. Elle a quatre-vingt-deux ans, elle est handicapée physique depuis l'âge de trente ans, à la suite d'un accident de trapèze, et elle vit avec nous. Et ça, pour moi, c'est à la fois normal et apaisant."
DANIÈLE, 54 ANS, SÉPARÉE, QUATRE ENFANTS, UN PETIT-FILS
"Je suis une mère et une grand-mère comblée."
"À trente-cinq ans, je vivais comme une mémère. En apparence, j'étais une épouse de notable parfaite, avec tailleur, maquillage et cheveux longs, qui élevait ses quatre fils, faisait ses mondanités, visites à l'hôpital, bridge etc. Mais en coulisse, mon mari m'humiliait, me dévalorisait et me trompait à tout bout de champ. J'ai tellement subi, encaissé, accepté, que j'ai vraiment failli y laisser ma peau. Il m'a fallu beaucoup de temps, des années, pour que je puisse commencer à me dire: "Mais qu'est-ce qui peut t'arriver de pire que ce que tu vis en ce moment?" et pour que je puisse enfin envisager de réagir.
"En 2002, j'ai décidé de reprendre mon métier d'institutrice dans l'enseignement privé et, parallèlement, des études universitaires. Et en 2005, j'ai pu enfin claquer la porte du domicile conjugal.
"Une vraie renaissance. À quarante-neuf ans, je recommençais une nouvelle vie. J'ai enseigné et dirigé deux écoles. J'ai réalisé plein de projets et d'opérations avec les élèves et les parents, je me suis énormément battue dans mon travail, et cela m'a passionnée. Quand j'ai reçu les louanges du maire et du diocèse, cela m'a fait du bien. Mon mari m'avait tellement traitée de nulle que j'avais besoin de me prouver que je valais quelque chose.
"J'ai cinquante-quatre ans, et jamais je ne me suis sentie aussi forte ni aussi heureuse. Je suis une mère et une grand-mère comblée. Et je ne suis plus une mémère. Deux ou trois hommes m'ont proposé une aventure. Mais pour le moment, je me sens mieux dans l'amitié. J'aspire à un peu moins de stress et d'hyperactivité.
"J'ai commencé un parcours spirituel, depuis deux ans, pour mieux connaître mes limites et unifier ma vie. Mais je sais déjà que je peux vieillir tranquille. Car je ne deviendrai jamais la vieille folle aigrie et amère que j'aurais pu être si je n'avais pas repris ma vie en main."
- 15 faits intéressants sur les célibataires
- UnAmourUnevie.com, un site de rencontre sérieuse pour idéalistes
- L'amour en ligne après 50 ans
- Principe de base sujet des rencontres en ligne: ce n'est jamais personnel
- Les sites de rencontres pour les parents solo sont-ils efficaces?
- Lettre d'une femme de 50 et plus
- Est-ce que les hommes de 50 ans préfèrent les femmes plus jeune ?
- J'ai 50ans et j'aime bien vieillir
- Trucs et astuces pour reconnaître les gens célibataires.
- Est-ce que joindre un site de rencontres seniors, va ruiner ma réputation?
- Il n'y a pas d'âge pour l'amour...
- Et si on arrêtait de vieillir